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Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/194

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aussi favorables que celles qu’avoient les Francs : ils gardèrent donc le droit romain. Ils n’en recevoient aucun préjudice ; et il leur convenoit d’ailleurs, parce qu’il étoit l’ouvrage des empereurs chrétiens.

D’un autre côté, dans le patrimoine des Wisigoths, la loi wisigothe ne donnant aucun avantage civil aux Wisigoths sur les Romains, les Romains n’eurent aucune raison de cesser de vivre sous leur loi pour vivre sous une autre : ils gardèrent donc leurs lois, et ne prirent point celles des Wisigoths.

Ceci se confirme à mesure qu’on va plus avant. La loi de Gondebaud fut très impartiale, et ne fut pas plus favorable aux Bourguignons qu’aux Romains. Il paraît, par le prologue de cette loi, qu’elle fut faite pour les Bourguignons, et qu’elle fut faite encore pour régler les affaires qui pourroient naître entre les Romains et les Bourguignons ; et, dans ce dernier cas, le tribunal fut mi-parti. Cela étoit nécessaire pour des raisons particulières, tirées de l’arrangement politique de ces temps-là. Le droit romain subsista dans la Bourgogne, pour régler les différends que les Romains pourroient avoir entre eux. Ceux-ci n’eurent point de raison pour quitter leur loi, comme ils en eurent dans le pays des Francs ; d’autant mieux que la loi salique n’étoit point établie en Bourgogne, comme il paraît par la fameuse lettre qu’Agobard écrivit à Louis le Débonnaire.

Agobard demandoit à ce prince d’établir la loi salique dans la Bourgogne : elle n’y étoit donc pas établie. Ainsi le droit romain subsista, et subsiste encore dans tant de provinces qui dépendoient autrefois de ce royaume.

Le droit romain et la loi gothe se maintinrent de même dans le pays de l’établissement des Goths : la loi salique n’y fut jamais reçue. Quand Pépin et Charles Martel en chassèrent les Sarrazins, les villes et les