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Chapitre VI

Comment le droit romain se conserva dans le domaine des Lombards


Tout se plie à mes principes. La loi des Lombards étoit impartiale, et les Romains n’eurent aucun intérêt à quitter la leur pour la prendre. Le motif qui engagea les Romains sous les Francs à choisir la loi salique, n’eut point de lieu en Italie ; le droit romain s’y maintint avec la loi des Lombards.

Il arriva même que celle-ci céda au droit romain ; elle cessa d’être la loi de la nation dominante ; et, quoiqu’elle continuât d’être celle de la principale noblesse, la plupart des villes s’érigèrent en républiques, et cette noblesse tomba, ou fut exterminée. Les citoyens des nouvelles républiques ne furent point portés à prendre une loi qui établissoit l’usage du combat judiciaire, et dont les institutions tenoient beaucoup aux coutumes et aux usages de la chevalerie. Le clergé, dès lors si puissant en Italie, vivant presque tout sous la loi romaine, le nombre de ceux qui suivoient la loi des Lombards dut toujours diminuer.

D’ailleurs, la loi des Lombards n’avoit point cette majesté du droit romain, qui rappeloit à l’Italie l’idée de sa domination sur toute la terre ; elle n’en avoit pas l’étendue. La loi des Lombards et la loi romaine ne pouvoient plus servir qu’à suppléer aux statuts des villes qui s’étoient érigées en républiques ; or qui pouvoit mieux y suppléer, ou la loi des Lombards, qui ne statuoit que sur quelques cas, ou la loi romaine, qui les embrassoit tous ?