Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/221

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ménagement pour le clergé ; peut-être que, comme on étendoit l’usage des combats, on voulut les rendre moins sanguinaires. Le capitulaire de Louis le Débonnaire donne le choix de combattre avec le bâton ou avec les armes. Dans la suite il n’y eut que les serfs qui combattissent avec le bâton.

Déjà je vois naître et se former les articles particuliers de notre point d’honneur. L’accusateur commençoit par déclarer devant le juge qu’un tel avoit commis une telle action ; et celui-ci répondoit qu’il en avoit menti  ; sur cela, le juge ordonnoit le duel. La maxime s’établit que, lorsqu’on avoit reçu un démenti, il falloit se battre.

Quand un homme avoit déclaré qu’il combattroit, il ne pouvoit plus s’en départir ; et s’il le faisoit, il étoit condamné à une peine. De là suivit cette règle que, quand un homme s’étoit engagé par sa parole, l’honneur ne lui permettoit plus de la rétracter.

Les gentilshommes se battoient entre eux à cheval et avec leurs armes  ; et les vilains se battoient à pied et avec le bâton. De là il suivit que le bâton étoit l’instrument des outrages, parce qu’un homme qui en avoit été battu, avoit été traité comme un vilain.

Il n’y avoit que les vilains qui combattissent à visage découvert  ; ainsi il n’y avoit qu’eux qui pussent recevoir des coups sur la face. Un soufflet devint une injure qui devoit être lavée par le sang, parce qu’un homme qui l’avoit reçu avoit été traité comme un vilain.