Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/314

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ce n’est pas tout : il y avait un règlement qui ne permettait guère de soumettre ces hommes libres à des tributs. Celui qui avait quatre manoirs était toujours obligé de marcher à la guerre ; celui qui n’en avait que trois était joint à un homme libre qui n’en avait qu’un ; celui-ci le défrayait pour un quart, et restait chez lui. On joignait de même deux hommes libres qui avaient chacun deux manoirs ; celui des deux qui marchait était défrayé de la moitié par celui qui restait.

Il y a plus : nous avons une infinité de chartres où l’on donne les privilèges des fiefs à des terres ou districts possédés par des hommes libres, et dont je parlerai beaucoup dans la suite. On exempte ces terres de toutes les charges qu’exigeaient sur elles les comtes et autres officiers du roi ; et, comme on énumère en particulier toutes ces charges, et qu’il n’y est point question de tributs, il est visible qu’on n’en levait pas.

Il était aisé que la maltôte romaine tombât d’elle-même dans la monarchie des Francs : c’était un art très compliqué, et qui n’entrait ni dans les idées ni dans le plan de ces peuples simples. Si les Tartares inondaient aujourd’hui l’Europe, il faudrait bien des affaires pour leur faire entendre ce que c’est qu’un financier parmi nous.

L’auteur incertain de la Vie de Louis le Débonnaire, parlant des comtes et autres officiers de la nation des Francs que Charlemagne établit en Aquitaine, dit qu’il leur donna la garde de la frontière, le pouvoir militaire, et l’intendance des domaines qui appartenaient à la couronne. Cela fait voir l’état des revenus du prince dans la seconde race. Le