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Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/45

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suppose que, par le poids & le titre de l’argent, l’écu de trois livres d’argent valût quarante gros ; & que, le change se faisant en papier, l’écu de trois livres, en papier, ne valût que huit gros ; la différence étoit de quatre cinquiemes. L’écu de trois livres, en papier, valoit donc quatre cinquiemes de moins que l’écu de trois livres en argent.


CHAPITRE XI.

Des opérations que les Romains firent sur les monnoies.


QUELQUES coups d’autorité que l’on ait faits, de nos jours, en France, sur les monnoies, dans deux ministeres consécutifs, les Romains en firent de plus grands ; non pas dans le temps de cette république corrompue, ni dans celui de cette république qui n’étoit qu’une anarchie ; mais lorsque, dans la force de son institution, par sa sagesse, comme par son courage, après avoir vaincu les villes d’Italie, elle disputoit l’empire aux Carthaginois.

Et je suis bien aise d’approfondir un peu cette matiere, afin qu’on ne fasse pas un exemple de ce qui n’en est point un.

Dans la premiere guerre punique[1], l’as, qui devoit être de douze onces de cuivre, n’en pesa plus que deux ; &, dans la seconde, il ne fut plus que d’une. Ce retranchement répond à ce que nous appellons aujourd’hui augmentation des monnoies : ôter d’un écu de six livres la moitié de l’argent, pour en faire deux, ou le faire valoir douze livres, c’est précisément la même chose.

Il ne nous reste point de monument de la maniere dont les Romains firent leur opération dans la premiere


  1. Pline, histoire naturelle, livre XXXIII, art. 13.