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Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/73

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CHAPITRE XIV.

Des productions de la terre, qui demandent plus ou moins d’hommes.


LES pays de pâturages sont peu peuplés, parce que peu de gens y trouvent de l’occupation ; les terres à bled occupent plus d’hommes, & les vignobles infiniment davantage.

En Angleterre, on s’est souvent plaint que l’augmentation des pâturages diminuoit les habitans[1] ; & on observe, en France, que la grande quantité de vignobles y est une des grandes causes de la multitude des hommes.

Les pays où des mines de charbon fournissent des matières propres à brûler, ont cet avantage sur les autres, qu’il n’y faut point de forêts, & que toutes les terres peuvent être cultivées.

Dans les lieux où croît le riz, il faut de grands travaux pour ménager les eaux : beaucoup de gens y peuvent donc être occupés. Il y a plus : il y faut moins de terres pour fournir à la subsistance d’une famille, que dans ceux qui produisent d’autres grains : enfin, la terre, qui est employée ailleurs à la nourriture des animaux, y sert immédiatement à la subsistance des hommes ; le travail que font ailleurs les animaux est fait, là, par les hommes ; & la culture des terres devient, pour les hommes, une immense manufacture.


  1. La plupart des propriétaires des fonds de terre, dit Burnet, trouvant plus de profit en la vente de leur laine, que de leur bled, enfermerent leurs possessions ; les communes, qui mouroient de faim, se souleverent : on proposa une loi agraire ; le jeune roi écrivit même là-dessus : on fit des proclamations contre ceux qui avoient renfermé leurs terres. Abrégé de l’histoire de la réform. pag. 44 & 83.