qui nous plaît davantage dans nos amis ? Ce sont les louanges continuelles, que nous levons sur eux comme des tributs.
D’où vient qu’il n’y a plus de véritable amitié parmi les hommes ? que ce nom n’est plus qu’un piège, qu’ils emploient avec bassesse pour se séduire ? « C’est, dit un poète, parce qu’il n’y a plus de sincérité[1]. »
En effet, ôter la sincérité de l’amitié, c’est en faire une vertu de théâtre ; c’est défigurer cette reine des cœur ; c’est rendre chimérique l’union des âmes ; c’est mettre l’artifice dans ce qu’il y a de plus saint, et la gêne dans ce qu’il y a de plus libre. Une telle amitié, encore un coup, n’en a que le nom, et Diogène avoit raison de la comparer à ces inscriptions que l’on met sur les tombeaux, qui ne sont que de vains signes de ce qui n’est point[2].
Les anciens, qui nous ont laissé des éloges si magnifiques de Caton, nous l’ont dépeint comme s’il avoit eu le cœur de la sincérité même. Cette liberté, qu’il chérissoit tant, ne paroissoit jamais mieux que dans ses paroles. Il sembloit qu’il ne pouvoit donner son amitié qu’avec sa vertu. C’étoit plutôt un lien de probité que d’affection, et il reprenoit ses amis, et parce qu’ils étoient ses amis, et parce qu’ils étoient hommes.
C’est sans doute un ami sincère que la fable nous cache dans ses ombres, lorsqu’elle nous représente une divinité favorable, la Sagesse elle-même, qui