Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/197

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de politique, et cela ne peut pas être autrement. Quand ceux qui sont gouvernés sont dans l’ignorance, il faudroit que ceux qui gouvernent eussent à chaque instant une inspiration particulière pour n’y être pas eux-mêmes, puisqu’ils sont du corps 5 de la Nation, et qu’ils ne sont pas, ce que Caligula prétendoit être, des bergers qui ont de l’intelligence, qui conduisent des troupeaux qui n’en ont pas.

Quand on considère la plupart des hommes de notre nation, on est toujours dans l’admiration de 10 voir tant d’esprit et si peu de lumières, des bornes si étroites avec tant de force pour les passer.

330* (1867. III, f° 112). — Il y a des nations où, pour les hommes, il sembloit que la Nature avoit tout fait, et qui semblent s’y refuser. Elle sembloit i5 les avoir mis au-dessus des autres, et ils se mettent au-dessous. On n’a jamais vu tant d’esprit et si peu de lumières. Mais, comme le cœur conduit l’esprit, l’esprit, à son tour, conduit le cœur. Il faut donc perfectionner l’esprit. 20

331* (1936. III, f° i53 v°). — Comment les avantages anciens ont été compensés par d’autres ; comment l’esprit militaire est resté dans les armées et a disparu du gouvernement civil ; comment l’esprit militaire n’a point étouffé l’esprit de ai commerce ; comment les ministres habiles ont conservé l’esprit de la monarchie et ont évité de le choquer, et même de le laisser s’affaiblir ; comment ils ont regardé cet esprit comme le plus sacré trésor