Aller au contenu

Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/347

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

plus sujets aux caprices de la Fortune. On fait valoir un empire comme un fermier fait valoir sa terre : on en tire le plus qu’on peut. Si l’on fait la guerre, elle se fait par commission et seulement pour avoir des terres qui donnent des subsides. Ce qu’on appe- 5 loit autrefois gloire, lauriers, trophées, triomphes, couronnes, est aujourd’hui de l’argent comptant.

585* (16o3. II, f° 458). — Les premières histoires sont celles des Dieux. Ces Dieux se changent en héros à mesure que les temps deviennent moins 10 grossiers. Ces héros n’ont pour enfants que des hommes, parce que le monde commence à devenir plus éclairé, et que l’on voit les enfants de plus près que les pères.

Les mythologistes, embarrassés à débrouiller l’his- 15 toire et la génération des Dieux, firent deux sectes différentes. Les uns distinguoient et multiplioient les Divinités : tels étoient les poètes et les scholiastes. Les autres, plus subtils, vouloient tout simplifier, tout réduire, tout confondre : de ce nombre étoient 20 les philosophes.

Mais il faut avouer qu’il y avoit bien peu de philosophie à se charger du pénible emploi de mettre la superstition en système et de ranger ce qui étoit sans cesse brouillé par les écarts des poètes, les fantaisies 25 des peintres, l’avarice des prêtres et la prodigieuse fécondité des superstitieux.

Ce n’étoit pas la seule branche de ce procès immortel : les uns, plus grossiers, vouloient tout entendre à la lettre ; les autres, plus spirituels, ne 3o