Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t2, 1901.djvu/445

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conviendroit mieux : de joindre ce million de diminution au fonds d’amortissement, ou bien de diminuer d’autant les impôts qu’on lève sur le peuple. Cela m’a fait faire des réflexions sur la nature des fonds d’amortissement. 5

Un fonds d’amortissement n’est bon que quand il est éternel. Il n’est éternel que lorsqu’il est perpétuellement appliqué ; autrement, c’est un fonds d’amortissement qui n’amortit pas. Plus le gouvernement sera constant, plus le fonds d’amortissement 1o doit être léger ; parce que cinquante ans d’un gouvernement constant peuvent être égaux à deux d’un gouvernement qui ne l’est pas. J’appelle gouvernement constant celui qui peut faire des opérations constantes, c’est-à-dire indépendantes de la t5 mort d’un prince ou de la chute d’un ministre. Ua État ne peut devoir que jusqu’à un certain point. Si l’État approche de ce point, il est dans un grand danger, parce que, le moindre danger du gouvernement pouvant faire hausser l’intérêt de l’argent, il 2o n’emprunte que laborieusement, parce qu’il ne lui reste que peu de fonds à appliquer pour assurer ses emprunts, et que les anciennes dettes tombent de valeur. Il y a plus. Quand cet État, par de certains efforts, pourroit augmenter un fonds d’amortissement 15 modéré, il ne devroit pas le faire ; par la raison que, faisant tout d’un coup un gros payement, il court risque d’obliger les sujets d’envoyer leurs fonds dans les pays étrangers, ou, du moins, de faire tomber le capital des fonds publics, que tout État 3o doit maintenir, parce que c’est la richesse publique ;