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DE L’ESPRIT DES LOIS.


vent que les enfants succèdent aux pères ; mais il ne l’exige pas toujours.

Les lois de nos fiefs ont pu avoir des raisons pour que l’ainé des mâles, ou les plus proches parents par mâles, eussent tout, et que les filles n’eussent rien ; et les lois des Lombards [1] ont pu en avoir pour que les sœurs, les enfants naturels, les autres parents et, à leur défaut, le fisc, concourussent avec les filles.

Il fut réglé dans quelques dynasties de la Chine, que les frères de l’Empereur lui succéderoient, et que ses enfants ne lui succéderoient pas. Si l’on vouloit que le prince eût une certaine expérience, si l'on craignoit les minorités, s’il falloit prévenir que des eunuques ne plaçassent successivement des enfants sur le trône, on put très-bien établir un pareil ordre de succession ; et quand quelques [2] écrivains ont traité ces frères d’usurpateurs, ils ont jugé sur des idées prises des lois de ces pays-ci.

Selon la coutume de Numidie [3], Delsace, frère de Gela [4], succéda au royaume, non pas Massinisse, son fils. Et encore aujourd’hui [5], chez les Arabes de Barbarie, où chaque village a un chef, on choisit, selon cette ancienne coutume, l’oncle, ou quelque autre parent, pour succéder.

Il y a des monarchies purement électives ; et, dès qu’il est clair que l’ordre des successions doit dériver des lois politiques ou civiles, c’est à elles à décider dans quels cas

  1. Liv. II, tit. XIV, § 6, 7 et 8. (M.)
  2. Le P. du Halde, sur la seconde dynastie. (M.)
  3. Tite-Live, liv. XXIX, chap. XXIX. (M.)
  4. Œlsace, frère de Gala.
  5. Voyez les Voyages de M. Schaw, tome I, p. 402. (M.) Cette phrase du texte : Et encore aujourd’hui, etc., n'est pas dans A. B.