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Liv. III. Chap. V.

doit se garder de s’en servir[1]. Tant il est vrai que la vertu n’est pas le ressort de ce gouvernement ! Certainement elle n’en est point exclue ; mais elle n’en est pas le ressort.




CHAPITRE VI.

Comment on supplée à la vertu dans le gouvernement monarchique.


Je me hâte & je marche à grands pas, afin qu’on ne croie pas que je fasse une satire du gouvernement monarchique. Non : s’il manque d’un ressort, il en a un autre. L’honneur, c’est-à-dire, le préjugé de chaque personne & de chaque condition, prend la place de la vertu politique dont j’ai parlé, & la représente par-tout. Il y peut inspirer les plus belles actions ; il peut, joint à la force des lois, conduire au but du gouvernement comme la vertu même.

Ainsi dans les monarchies bien réglées, tout le monde sera à peu près bon citoyen, & on trouvera rarement

  1. Il ne faut pas, y est-il dit, se servir de gens de bas lieu ; il sont trop austeres & trop difficiles.