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De l’esprit des Lois,

dans l’Italie, les peuples furent gouvernés comme des confédérés : on suivoit les lois de chaque république. Mais lorsqu’elle conquit plus loin, que le sénat n’eut pas immédiatement l’œil sur les provinces, que les magistrats qui étoient à Rome ne purent plus gouverner l’empire, il fallut envoyer des préteurs & des proconsuls. Pour lors, cette harmonie des trois pouvoirs ne fut plus. Ceux qu’on envoyoit avoient une puissance qui réunissoit celle de toutes les magistratures Romaines ; que dis-je ? celle même du sénat, celle même du peuple[1]. C’étoient des magistrats despotiques, qui convenoient beaucoup à l’éloignement des lieux où ils étoient envoyés. Ils exerçoient les trois pouvoirs ; ils étoient, si j’ose me servir de ce terme, les bachas de la république.

Nous avons dit ailleurs[2] que les mêmes citoyens, dans la république, avoient, par la nature des choses, les emplois civils & militaires. Cela fait qu’une république qui conquiert, ne

  1. Ils faisoient leurs édits en entrant dans les provinces.
  2. Liv. V. ch. XIX. Voyez aussi les liv. II, III, IV & V.