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De l’esprit des Lois,

doivent donc succéder, à moins que quelque raison particuliere ne s’y oppose, comme au Japon, où il n’y a que les enfans de la femme donnée par l’empereur qui succedent. La politique y exige que les biens aue l’empereur donne, ne soient pas trop partagés, parce qu’ils sont soumis à un service, comme étoient autrefois nos fiefs.

Il y a des pays où une femme légitime jouit dans la maison, à-peu-près, des honneurs qu’a dans nos climats une femme unique : là, les enfans des concubines sont censés appartenir à la premiere femme. Cela est ainsi établi à la Chine. Le respect filial[1], la cérémonie d’un deuil rigoureux ne sont point dus à la mere naturelle, mais à cette mere que donne la loi.

A l’aide d’une telle fiction[2], il n’y a plus d’enfans bâtards : & dans les pays où cette fiction n’a pas lieu, on voit bien que la loi qui légitime les en-

  1. Le Pere du Halde, tome II. Page 124.
  2. On distingue les femmes en grandes & petites ; c’est-à-dire, en légitimes ou non ; mais il n’y a point une pareille distinction entre les enfans. C’est la grande doctrine de l’empire, est-il dit dans un ouvrage Chinois, sur la morale, traduit par le même Pere, page 140.