Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 3.djvu/149

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
119
Liv. XXIII. Chap. XXIX.


CHAPITRE XXIX.

Des Hôpitaux.


Un homme n’est pas pauvre parce qu’il n’a rien, mais parce qu’il ne travaille pas. Celui qui n’a aucun bien & qui travaille, est aussi à son aise que celui qui a cent écus de revenu sans travailler. Celui qui n’a rien, & qui a un métier, n’est pas plus pauvre que celui qui a dix arpens de terre en propre, & qui doit les travailler pour subsister. L’ouvrier qui a donné à ses enfans son art pour héritage, leur a laissé un bien qui s’est multiplié à proportion de leur nombre. Il n’en est pas de même de celui qui a dix arpens de fonds pour vivre, & qui les partage à ses enfans.

Dans les pays de commerce, où beaucoup de gens n’ont que leur art, l’état est souvent obligé de pourvoir aux besoins des vieillards, des malades & des orphelins. Un état bien policé tire cette subsistance du fonds des arts mêmes ; il donne aux uns les travaux dont ils sont capables ; il enseigne les autres à travailler, ce qui fait déjà un travail.