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De l’esprit des Lois,

fortune ; non pas par ce qui avertit, mais par ce qui fait que l’on oublie ; non pas par ce qui indigne, mais par ce qui jette dans la tiédeur, lorsque d’autres passions agissent sur nos ames, & que celles que la religion inspire sont dans le silence. Regle générale : en fait de changement de religion, les invitations sont plus fortes que les peines.

Le caractere de l’esprit humain a paru dans l’ordre même des peines qu’on a employées. Que l’on se rappelle les persécutions du Japon[1] ; on se révolta plus contre les supplices cruels que contre les peines longues, qui lassent plus qu’elles n’effarouchent, qui sont plus difficiles à surmonter, parce qu’elles paroissent moins difficiles.

En un mot, l’histoire nous apprend assez que les lois pénales n’ont jamais eu d’effet que comme destruction.

  1. Voyez le recueil des voyages qui ont servi à l’établissement de la compagnie des Indes, tome V., part. I. page 192.