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De l’esprit des Lois,

politique, qui a pour objet le bien & la conservation de l’état.

Il suit de là que, lorsque la loi politique a établi dans un état un ordre de succession, & que cet ordre vient à finir, il est absurde de réclamer la succession en vertu de la loi civile de quelque peuple que ce soit. Une société particuliere ne fait point de lois pour une autre société. Les lois civiles des Romains ne sont pas plus applicables que toutes autres lois civiles ; ils ne les ont point employées eux-mêmes, lorsqu’ils ont jugé les rois : & les maximes par lesquelles ils ont jugé les rois, sont si abominables, qu’il ne faut point les faire revivre.

Il suit encore de là que, lorsque la loi politique a fait renoncer quelque famille à la succession, il est absurde de vouloir employer les restitutions tirées de la loi civile. Les restitutions sont dans la loi, & peuvent être bonnes contre ceux qui vivent dans la loi : mais elles ne sont pas bonnes pour ceux qui ont été établis pour la loi, & qui vivent pour la loi.

Il est ridicule de prétendre décider des droits des royaumes, des nations & de l’univers, par les mêmes maximes