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Liv. XXVIII. Chap. XVII.


Comme aujourd’hui les Turcs, dans leurs guerres civiles, regardent la premiere victoire comme un jugement de Dieu qui décide ; ainsi les peuples Germains, dans leurs affaires particulieres, prenoient l’événement du combat pour un arrêt de la providence toujours attentive à punir le criminel ou l’usurpateur.

Tacite dit que, chez les Germains, lorsqu’une nation vouloit entrer en guerre avec une autre, elle cherchoit à faire quelque prisonnier qui pût combattre avec un des siens ; & qu’on jugeoit, par l’événement de ce combat, du succès de la guerre. Des peuples qui croyoient que le combat singulier régleroit les affaires publiques, pouvoient bien penser qu’il pourroit encore régler les différents des particuliers.

Gondebaud[1], roi de Bourgogne, fut de tous les rois celui qui autorisa le plus l’usage du combat. Ce prince rend raison de sa loi dans sa loi même : « C’est, dit-il, afin que nos sujets ne fassent plus de serment sur des faits obscurs, & ne se parjurent point sur des faits certains ». Ainsi, tandis que

  1. La loi des Bourguignons, chap. xlv.