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Liv. XXVIII. Chap. XVIII.

séculières, on recourût aux églises[1] & aux autels ; & de l’autre, une noblesse fiere aimoit à soutenir ses droits par son épée.

Je ne dis point que ce fut le clergé qui eût introduit l’usage dont la noblesse se plaignoit. Cette coutume dérivoit de l’esprit des lois des barbares, & de l’établissement des preuves négatives. Mais une pratique qui pouvoit procurer l’impunité à tant de criminels, ayant fait penser qu’il falloit se servir de la sainteté des églises pour étonner les coupables & faire pâlir les parjures, les ecclésiastiques soutinrent cet usage & la ptratique à laquelle il étoit joint ; car d’ailleurs ils étoient opposés aux preuves négatives. Nous voyons dans Beaumanoir[2] que ces preuves ne furent jamais admises dans les tribunaux ecclésiastiques ; ce qui contribua sans doute beaucoup à les faire tomber, &

  1. Les serment judiciaire se faisoit pour lors dans les églises ; & il y avoit dans la premiere race, dans le palais des rois, une chapelle exprès pour les affaires qui s’y jugeoient. Voyez les formules de Marculse, liv. I, chap. xxxviii, les lois des Ripuaires, tit. 59, §. 4 ; tit. 65, §. 5 ; l’histoire de Grégoire de Tours ; le capitulaire de l’an 803, ajouté à la loi salique.
  2. Chapitre xxxix, page 212.