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De l’esprit des Lois,

les maires & les rois, le prétexte de l’oppression des églises, il ne pouvoit plus les dépouiller, sans contredire son titre, & faire voir qu’il se jouoit de la nation. Mais la conquête de deux grands royaumes & la destruction du parti opposé, lui fournirent assez de moyens de contenter ses capitaines.

Pépin se rendit maître de la monarchie, en protégeant le clergé : Charles Martel son fils ne put se maintenir qu’en l’opprimant. Ce prince, voyant qu’une partie des biens royaux & des biens fiscaux avoient été donnés à vie ou en propriété à la noblesse ; & que le clergé, recevant des mains des riches & des pauvres, avoit acquis une grande partie des allodiaux même ; il dépouilla les églises : & les fiefs du premier partage ne subsistant plus, il forma[1] une seconde fois des fiefs. Il prit, pour lui & pour ses capitaines, les biens des églises & les églises mêmes : & fit cesser un abus qui, à la différence des maux ordinaires, étoit d’autant plus facile à guérir, qu’il étoit extrême.

  1. Karolus plurima juri ecclesiastico detrahens, prœdia fisco sociavit, ac deinde militibus dispertivit, ex chronico Centulensi, liv. II.