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Liv. XXXI. Chap. XXII.

sur l’esprit de l’empereur, que ce prince suivoit sa volonté en toutes choses ; qu’à l’instigation de ce favori, il avoit donné les biens fiscaux[1] à tous ceux qui en avoient voulu ; & par-là avoit anéanti la république[2]. » Ainsi, il fit dans tout l’empire ce que j’ai dit qu’il avoit fait en Aquitaine[3] ; chose que Charlemagne répara, & que personne ne répara plus.

L’état fut mis dans cet épuisement où Charles Martel le trouva lorsqu’il parvint à la mairerie ; & l’on étoit dans ces circonstances, qu’il n’étoit plus question d’un coup d’autorité pour le rétablir.

Le fisc se trouva si pauvre, que, sous Charles le chauve, on ne maintenoit personne dans les honneurs[4] ; on n’accordoit la sureté à personne que pour de l’argent : quand on pouvoit détruire les Normands[5], on les laissoit échapper pour de l’argent : & le

  1. Hinc libertates, hinc publica in propriis usibus distribuere suasit. Nitard, liv. IV, à la fin.
  2. Rempublicam penitùs annulavit. Ibid.
  3. Voyez livre XXX, chap. xiii.
  4. Hincmar, lettre premiere à Louis le begue.
  5. Voyez le fragment de la chronique du monastere de S. Serge d’Angers, dans Duchesne, tome II, page 401.