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De l’esprit des Lois,

chez les Romains, des corps de bourgeoisie, un sénat, des cours de judicature ; on ne trouve guere, vers le commencement de la troisieme, qu’un seigneur & des serfs.

Lorsque les Francs, les Bourguignons & les Goths faisoient leurs invasions, ils prenoient l’or, l’argent, les meubles, les vêtemens, les hommes, les femmes, les garçons, dont l’armée pouvoit se charger ; le tout se rapportoit en commun, & l’armée le partageoit[1]. Le corps entier de l’histoire prouve, qu’après le premier établissement, c’est-à-dire après les premiers ravages, ils reçurent à composition les habitans, & leur laisserent tous leurs droits politiques & civils. C’étoit le droit des gens de ce temps-là ; on enlevoit tout dans la guerre, on accordoit tout dans la paix. Si cela n’avoit pas été ainsi, comment trouverions-nous, dans les lois saliques & Bourguignonnes, tant de dispositions contradictoires à la servitude générale des hommes ?

Mais ce que la conquête ne fit pas,

  1. Voyez Grégoire de Tours, liv. II, ch. xxvii, Aimoin, liv. I, chap. xii.