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de mouton ; on y ajoutait des œufs frais, des légumes farineux, des lentilles à l’huile, qu’il aimait beaucoup. Pendant son déjeuner, il faisait venir le docteur O’Meara et causait avec lui de toutes choses, du gouverneur d’abord, puis de nos santés et de ce qu’on disait en ville ; puis, suivant l’occasion et sa disposition d’humeur, il repassait les événements de sa vie, qu’amenait la conversation ou en réponse aux préventions que l’on avait eues contre lui en Angleterre, ainsi qu’on peut le voir dans le journal du docteur, si véridique et si intéressant. Avant son déjeuner, son maître d’hôtel avait pris ses ordres au moment d’aller en ville. Ce pauvre Cipriani, que nous devions perdre bientôt, était un Corse bien dévoué à l’Empereur, fin et sachant bien mettre à profit sa course quotidienne en ville pour tenir, autant que possible, au courant de ce que l’on avait intérêt à savoir. Après son entretien avec le docteur, l’Empereur causait, dictait ou lisait ; quand il en avait assez, il s’habillait, s’il n’était point déjà sorti ; car, dans ce cas, il déjeunait et travaillait en robe de chambre ou pendant son bain. Ce bain, qu’il prenait presque tous les jours, durait deux