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Massillon ; mais je prie Dieu de toute la force de mon âme qu’il me rende mon Albine et mes enfants. Votre souvenir est sans cesse présent à ma pensée et je suis comme absorbé par le besoin que j’ai de vous ; en toutes choses, tu manques à ma vie, je ne puis me passer de toi. Est-ce la solitude de Longwood ? Non, car je ne m’ennuie pas : c’est l’amour fortifié par l’habitude, et je puis dire qu’en me séparant de toi, on m’a privé de la moitié de moi-même. Je n’éprouve pas, comme dans nos précédentes séparations, ce mal aigu qui me portait à l’agitation et à l’exaltation ; je suis calme ; mon mal est profond ; tout mouvement m’est désagréable et je ne me trouve soulagé que dans l’inaction et la solitude.

Bertrand continue à venir me voir régulièrement ; quant à sa femme, je ne l’ai pas vue depuis huit ou dix jours.

Adieu, mon Albine chérie ; soigne bien ta santé. Je calcule que tu es déjà arrivée ou du moins bien près de l’être ; tu auras donc six semaines à prendre les eaux de Cheltenham, si l’on te permet d’y aller.

J’espère un peu qu’avant l’hiver je serai près de toi. Je le désire si ardemment que je ne puis croire que mes vœux ne soient pas exaucés.

Embrasse bien mes pauvres enfants pour moi : Édouard[1], Tristan, Charles, Lili, Joséphine. Dis à

  1. Édouard Roger, son beau-fils, qui était déjà âgé de quinze ans et demi (comte Roger, du Nord). — Du C.