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caroline

il ne pouvoit plus se taire. Il raconta à Caroline toute l’histoire du mariage de sa fille ; et comme il ne vouloit point de Justin ; et comme monseigneur l’attrapa ; et comme il leur donna une bonne ferme, et cent ducats comptant ; et comme il eut le malheur de se blesser en sortant de chez eux ; et comme ils le portèrent au château, etc.

Caroline savoit tous ces détails par le cahier de Lindorf ; cependant elle écoutoit avec délices. L’éloquence simple et naïve de ce bon paysan, le ton pénétré et vrai avec lequel il racontoit, le plaisir qu’il avoit à parler, et surtout l’éloge de son époux à chaque instant répété, l’attendrissoient jusqu’aux larmes. Elle le regarda cet époux si chéri et si digne de l’être ; il étoit ému comme elle. Elle lui tendit la main avec un sourire, une expression, un regard qu’on ne peut décrire. C’étoit l’amour, la vertu, le bonheur ; ce seul instant auroit suffi pour compenser un siècle de peines.