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caroline

endormi profondément ; ses enfans le réveillèrent à demi, et l’emmenèrent. Le cœur de Caroline étoit si rempli de mille sensations, qu’elle avoit besoin de l’épancher. Dès qu’elle fut seule avec le comte, elle se laissa aller à son attendrissement, et versa les plus douces larmes. Ce vieillard, ces enfans, ce couple si uni, la vénération, l’amour de ces bonnes gens pour le comte, qui rejaillissoit sur elle : tout avoit exalté son imagination et sa sensibilité, au point que son époux lui paroissoit un être surnaturel, un dieu bienfaisant, qu’elle devoit adorer, et qu’elle adoroit en effet. Ces sentimens, si long-temps comprimés et retenus dans son cœur, elle ose à présent leur donner essor ; elle ose dire et répéter au plus aimé des hommes, qu’il l’est avec passion, qu’il le sera toujours ; elle ose lui chanter en entier cette romance qu’elle composa et chanta si souvent loin de lui, avec tant de douleur. Cette preuve si forte et si touchante de son amour, elle