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CLIMAT DE CULTURE

En 1912, la « Délégation Champlain » vint au Canada. J’allai la rencontrer à Rouses’ Point. Dans le train, les délégués se partagèrent la corvée des discours et il fut convenu que René Bazin apporterait, dès le premier contact, le salut de la France au Canada français. Son allocution — la sentimentalité mise à part, sempiternel obligato des réceptions de ce genre — jaillit, toute faite, de la fenêtre du wagon par où l’auteur avait regardé, en réfléchissant comme nous devrions regarder et réfléchir :

« Canadiens français, j’ai deviné à plus d’un signe et longtemps d’avance, hier, que nous approchions de votre pays. Dès le sud du lac Champlain, j’ai commencé d’observer que les labours étaient bien soignés. Les mottes s’alignent bien droit, sans faire un coude, tout le long des guérets. À peine la neige avait fondu que déjà de grands amis de la terre, de fins laboureurs, ouvraient les sillons pour la semence. Et j’ai pensé : « C’est comme chez nous… »

« Un peu plus loin j’ai vu des haies, des palissades, plus multipliées qu’en pays de New-York. L’espace était immense, mais il était clos, et j’ai songé : « Ce sont bien sûr nos gens, qui aiment à être chez eux. »

« En même temps, le caractère des paysages, par la culture qui fait une physionomie plus souple et plus vivante au sol, le caractère des paysages changeait. Quelques-uns de nous disaient : Ne trouvez-vous pas que cela ressemble à la région des