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LE FRONT CONTRE LA VITRE

demeure même du recteur où une chambre aurait été occupée par sainte Jeanne d’Arc, la Faculté des lettres, autant de merveilles insoupçonnées.

Auditoire de sept à huit cents personnes, très sympathique. Je me sens à l’aise, me targuant aussitôt de mon origine et de mon nom poitevins. J’utilise la synthèse que j’ai tentée à l’École des Sciences politiques de Paris. Le sujet s’est décanté. Je simplifie, ce qui vaut mille fois mieux. Je reprends nos réactions après l’ancien régime et la conquête, du moment où nous fûmes « dépatriés », selon le mot d’une Ursuline. La natalité contre l’immigration ; la liberté politique contre l’anglicisation ; l’enrichissement contre le plus puissant des essors économiques ; l’école contre l’école. Cela me conduit à la culture et aux traits français. Je les révèle sans les exagérer. Ils sont ce qu’ils sont. Notre mérite ressort mieux d’un tableau plus humain. « Le Canada pour nous, m’explique le recteur, c’était un mot attachant et une chose lointaine comme un souvenir. Ce mot, vous l’avez animé d’humanité. Nous avons compris ce que vous avez vécu. Cela est vrai, et nouveau pour nous ».

Soirée chez le recteur, en présence des notabilités. J’en garde le programme dont l’exécution avait été confiée à l’École normale. Chansons françaises de chez nous et danses du XVIIIe siècle. C’est la vieille France, sous l’œil du préfet de la Troisième République. Je me reporte à Montréal, il y a trente ans, avant le phonographe, la radio et le jazz. C’est la même chose, jusque dans les moindres gestes, jus-