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LE FRONT CONTRE LA VITRE

Gaspé repose au fond d’un petit fjord agréable, au confluent de deux rivières. Méfiez-vous de vos yeux d’Européens, encore emplis du départ, des falaises du Havre et du délicieux Honfleur. Ils doivent se résoudre à voir neuf. Ici, tout est de colonisation récente. Une vie dure, entre le sol, la forêt et la mer. Et pourtant, un évêché, un collège, des écoles, des hôpitaux. Comme les choses changent peu pour ceux qui gardent l’inquiétude du génie français : Québec à ses débuts, de 1608 à 1635, n’était pas autre que ce coin de pays où persiste sa tradition.

Je souhaite qu’il y ait du soleil, un « grand » soleil, sur la journée de fleuve qui va suivre.

Quel repos, cette côte gaspésienne, striée de vallées profondes, au bout desquelles se blottissent des hameaux aux noms français : Rivière Madeleine, Sainte-Anne des Monts, Cap Chat, Matane, et, marquant la fin de la navigation océanique, la Pointe au Père. Puis, la litanie des baptêmes que fit Cartier. Les îles surtout qui redisent l’amusante impression d’un moment : l’Île aux Lièvres, l’Île aux Coudres, l’Île de Bacchus, dont on a fait, plus respectueusement, l’Île d’Orléans — et qui est pour nous un joyau, au type resté pur depuis la première empreinte.

Québec enfin, que Gabriel Hanotaux appelait hier « le reliquaire du Canada français », enchâssé dans un cirque de montagnes : la ligne haute des Laurentides qui s’achève dans le fleuve, au Cap Tourmente, dernier pan de la scène où prit place la bataille finale ; le rocher tourmenté qui soutient la ville ; le fond