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LE FRONT CONTRE LA VITRE

« Une terre, un climat, une histoire, qui vous sont propres, ont créé une nation canadienne, que vous servez avec passion, que vous revendiquez avec orgueil… Vous êtes devenus les associés de vos ennemis d’hier… Votre peuple s’épanouit sur deux troncs, qui puisent leur sève dans le même sol mais progressent également libres et bientôt sans doute également forts. »

Sur le carnet où, en écoutant l’écho des haut-parleurs, je griffonne des impressions, j’écris fébrilement : « Merci pour ces paroles ! » M. Flandin a compris, aux acclamations qui les ont accueillies, à quel point elles nous ont touchés. Qu’avons-nous enseigné à la France, de notre côté ? Je ne sais pas. Sa vitalité, peut-être, et sa durée. Elle nous a donné, en venant vers nous, une confirmation — je reprends le mot. Elle était là toute : religion, politique, pensée, travail. Elle nous a sentis Canadiens de résolution, Français de culture et d’expression, avec les qualités qui nous restent et les défauts que nous lui avons pris. Neuf cents personnes, qui donc aurait pu les « chambrer » pour leur servir, sur notre compte, les propos dont la France elle-même, dans le monde, est la victime ; ou ressasser les légendes dont nous abreuvent certains anglo-saxons. Nous sommes apparus dans notre simple vérité, faite d’écueils et de reprises et dont, jusqu’ici peut-être, on avait ignoré le tourment.

Je reviens, vers le soir, sur le Champlain. Spectacle familier, dont j’ai si souvent cherché le repos : les montagnes de Gaspé, pour dormir, s’incrustent