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LE FRONT CONTRE LA VITRE

L’ancien régime avait installé l’école, centre de ralliement, au milieu de nos solitudes. Détachée de la mère patrie, elle ressemblait à celle de France. À côté de cette école où l’on apprenait à lire, à écrire et à compter, où l’on apprenait à penser à la française, l’Église avait élevé une école plus pratique, destinée aux artisans ; et c’est une grande leçon que nous donnait Mgr de Laval pour la méditer chaque fois que nous aurions à rétablir ce qu’on appelle nos « virtualités ». Au début du régime anglais, nous avons vécu de notre propre substance, absents de la vie publique, réfugiés dans la pure tradition que gardaient seuls l’exemple et la parole : période blanche, dans l’héroïque histoire de l’enseignement français au Canada, celle où d’autres combats nous retenaient. Il a fallu des années avant que ne se redresse sur le champ de notre fidélité la silhouette, aujourd’hui familière, de la « petite école ».

Vouées à l’élite, les écoles spécialisées aussi durent attendre pour apparaître que nous eussions de nouveau grandi : quelques-unes, comme les écoles des beaux-arts, ne datent même que du vingtième siècle. « Un pays ne peut vivre et travailler sans une classe intelligente et des chefs, et qui connaît depuis longtemps, les traditions, les recettes, si vous aimez mieux, » écrit Georges Duhamel. Les écoles des beaux-arts tentent de nous redonner les recettes dont nous avions reçu le secret de la France même, à l’aube de notre vie. Pénétrées de leur mission, elles se sont mises à la tâche avec un enthousiasme qui, avec le temps, débordera leurs cadres et saisira le public. Elles ne négligent rien de notre redresse-