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Page:Montpetit - Au Service de la Tradition française, 1920.djvu/170

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LA TRADITION FRANÇAISE

soient bien vieux, peut-être connaîtront-ils la désillusion mauvaise. Ils comprendront comme à leur insu, sous l’aiguillon d’une douleur plus pénétrante que les autres, que la vie est un recommencement d’enthousiasmes et d’échecs. Vous ferez en sorte que l’expérience ne leur soit pas une raison de se décourager, mais qu’elle trempe au contraire leur personnalité en lui donnant ce que Barbey d’Aurévilly appelle si joliment « la vertu de l’acier ». Ils verront qu’il est parfois des joies qui consolent et toujours une conscience qui soutient.

— Et vous leur direz aussi, n’est-ce pas, vous qui aurez appris, qu’ils doivent apprendre à leur tour, qu’ils doivent travailler pour eux-mêmes sans doute, pour les autres aussi et, — j’y reviens d’un mot seulement, — pour leur pays.

Dans le très beau discours que prononçait ici même, il y a trois ans, M. le chanoine Gauthier, un passage entre autres m’a plus particulièrement frappé : « Nous avons peut-être, disait-il, dans la nouvelle Ecole supérieure des jeunes filles, le moyen de créer dans ce pays, à côté de l’élite financière dont il a le droit d’être fier, l’élite intellectuelle dont il a maintenant besoin. »

Le sens pratique a pu créer des peuples comme l’idéal jadis en a formé ; mais les nations qui ont connu d’abord la vie économique éprouvent, une fois grandies, le secret désir, le besoin de chercher