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LES POISSONS

souvent elles réussissent mieux que leurs rivales brillantes. À mesure que la saison avance et que le poisson remonte les eaux fraîches et claires, spécialement si les eaux sont basses et le temps sec, les mouches sombres sont préférables. Alors, la cow-dung, la alderfly, la turkey-brown, la winged black hackle, et de fait, toutes les mouches ordinaires sont en demande ; une mouche que j’ai inventée moi-même faite d’une aile de merle et d’un corps avec des pattes couleur claret, et nommée la mouche hâtive — the early fly — a eu de fréquents succès réellement étonnants ; et de fait toutes les mouches généralement employées dans d’autres eaux conviennent à la pêche de la truite de mer en Canada. »

Il importe peu que les dimensions de l’hameçon diffèrent des dimensions ordinaires pour la capture d’un gros poisson ; il sera d’une moyenne n° 9, avec une légère augmentation dans des eaux agitées. Rarement on emploiera plus d’un hameçon à la fois pour la capture de ces grosses pièces, et généralement, elles trancheront la difficulté, en en réduisant elles-mêmes le nombre ; mais en certains temps, lorsque le poisson est farouche, il semble être attiré par un plus grand nombre de mouches. Pour arriver à capturer le plus grand nombre de pièces possible, sans égard à l’art, on pourra recourir à une perche de ligne plus solide, quoique plus lourde, afin d’éviter la perte de temps que cause l’usage d’une canne délicate, dans l’enlèvement du poisson.

Le domaine de la truite de mer, en Amérique, s’étend sur une région infiniment plus vaste qu’en Europe. Jusqu’ici, nous l’avons prise au Maine, puis côtoyant l’Atlantique, en gagnant le pôle nord, nous l’avons suivie le long des rivages du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse et de l’île du Prince-Edouard, pour de là remonter avec elle le fleuve Saint-Laurent jusqu’au Saguenay, et ensuite redescendre jusqu’à Terre-Neuve où nous la retrouvons en marche devant nous le long des côtes du Labrador. De ce point, quittant les frères Moraves en voie de convertir les Esquimaux, nous la retrouvons dans la baie d’Ungava et la baie James, traquée par le nigog du Naskapis. Un peu plus loin, elle trouvera asile dans les nombreuses découpures de la baie d’Hudson et les embouchures des rivières qui s’y jettent, à l’est. Mais les cours d’eau qui arrosent les Barren Grounds ou terres désolées de la Keewatin ont refusé l’hospitalité à la truite de mer. En revanche, combien de fois les rivières du Gros-Poisson, du Cuivre, du Mackenzie, ne lui ont-elles pas donné le vivre et le couvert, ne l’ont-elles pas abritée contre les coups de terribles ennemis ? Ce n’est pas à dire que cette trutta canadensis soit la véritable truite de mer si bien caractérisée en Écosse et en France. Tout au contraire, nous croyons que cet animal a été subtilisé au profit de notre ichtyologie, par M. Perley, sous le couvert de Frank Forrester. S’il existe une truite de mer, de notre côté de l’Atlantique, il faut aller