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LES POISSONS

communication (et sans doute depuis longtemps) avec l’Asie. Cela est si vrai que certains cyprins d’Europe, la carpe, la tanche, introduits artificiellement dans le sud de l’Australie, y prospèrent, et qu’on les pêche couramment dans certaines rivières.

Les espèces de cyprins sont nombreuses. Sur les 3,900 poissons du globe nous comptons 1,600 cyprins et 1,000 silures.


Or, dans cette grande famille, il existe, non seulement des séries d’espèces voisines au dernier point, mais encore des types indécis et variables qui semblent flotter entre deux autres déjà très semblables, et n’en être que des métis. On dirait que suivant les fonds, les âges, des causes encore absolument inconnues, ces espèces se modulent les unes dans les autres, comme une cire molle que l’on pétrirait, sans sortir cependant d’un type à peu près commun.


Pour distinguer ces poissons on a essayé de se baser sur la proportion du corps, puisque les criteriums ordinaires faisaient défaut, les organes se trouvant presque en même nombre chez tous ; on a dû y renoncer, parce que ces proportions sont très variables. La différence de constitution des dents pharyngiennes paraît, jusqu’à présent, le meilleur signe de distinction, mais il n’est pas à la portée de tout le monde. Il faut une dissection préalable simple, il est vrai, mais enfin une opération que le pêcheur ne fera pas, et c’est pourquoi j’omets avec intention de publier ici des figures anatomiques qui passeront sous le nez sans se fixer au cerveau. J’ajouterai que l’âge fait varier cette denture, et annule ainsi souvent la certitude que les naturalistes avaient cru trouver dans ce caractère.


Il est certain qu’au premier coup d’œil, on peut déjà séparer les cyprinoïdes, les loches ou gobites, à tête petite, aux ouïes peu profondes, à dents pharyngiennes aiguës et nombreuses. Mais restent tous les cyprins proprement dits à classer, ceux dont le corps est couvert de grandes écailles.


Là-dessus, de la Blanchère fait observer :


« On a cru rendre plus simple et moins confuse la classification des cyprins, en élevant d’un degré la division que nos grands naturalistes y avaient introduite ; du rang d’espèces on en a fait des genres ; par conséquent, ce que l’on considérait primitivement comme de simples variétés sont devenues bel et bien des espèces, » ce qui a eu pour effet de désorienter l’intelligence de la classification des cyprins en évolutions dont nul ne sait et ne peut connaître le nombre.