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LES POISSONS

profondeurs où ils acquièrent tout leur développement, en même temps qu’une grande vigueur, dont le sportsman est ravi mais qui surprend et étonne parfois les pêcheurs novices. On a trouvé des siluroïdes dans les montagnes de l’Amérique du Sud, à une altitude de 14,000 pieds ; ceux-là ne vivaient pas assurément dans la vase, pas plus que ceux que vomissent assez fréquemment des volcans de ces mêmes régions, provenant sans doute de lacs souterrains, et qui sont invariablement aveugles. Il en est même qui vivent dans les cours d’eau les plus torrentueux des montagnes, grâce à un disque pectoral pneumatique qui leur permet de se fixer aux pierres et d’y braver la fureur des eaux déchaînées.


Fig. 43. — Le Silure de Tibériade ou Poisson de Saint-Pierre.


Le silure était parfaitement connu des anciens : Aristote en parle : Athénée, Juvénal, Élien en font mention. La mer Caspienne et les rivières qui s’y jettent en produisent tant, qu’il est au plus vil prix. À Astrakhan, la livre n’en vaut pas souvent un centime. Le Térek en produit du poids de plus de trois cents livres ; il est des lacs où l’on en a capturé qui pesaient cinq cents livres ; leur voracité est extrême et semble se développer dans la proportion de leur masse. Gessner rapporte qu’une fois on a trouvé dans l’un d’eux une tête humaine et une main portant deux anneaux d’or ; il dévore tout ce qu’il peut atteindre ; oies, canards, n’épargnant pas même le bétail quand il se rend à l’abreuvoir. S’il faut en croire Valenciennes, il va même jusqu’à s’attaquer à l’espèce humaine.

En 1700, le 3 juillet, un paysan en prit une auprès de Thorn qui avait un enfant entier dans l’estomac. On parle, en Hongrie, d’enfants et de jeunes filles dévorés en allant puiser de l’eau, et l’on raconte même, que sur les frontières de la Turquie, un pauvre pêcheur en prit un, un jour, qui avait dans l’estomac le corps d’une femme, sa bourse pleine d’or, et