Page:Montpetit - Souvenirs tome II, 1949.djvu/142

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
141
CONSCRIPTION

reau de travail » comme dit expressivement la langue populaire, il avait été terrassé en quelques jours.

Montalembert cite, dès la première ligne du livre qu’il a consacré à Lacordaire, la réflexion d’une Albigeoise venue assister, à Sorèze, aux obsèques du grand dominicain : Abion un rey, l’aben perdut. Ce mot, un peu modifié, est tombé de toutes les lèvres à l’annonce du malheur qui nous frappait : nous avions un chef, et nous l’avions perdu.

Il laissait des œuvres et, ce qui vaut mieux, une doctrine. Le vœu que nous exprimions lors de sa mort a été réalisé : la publication de ses discours, de ses conférences et de ses études, afin qu’il vive dans l’avenir et que nous retracions la filiation et l’ensemble de ses idées.

Il a combattu en arrachant la visière qui l’eût protégé. Il fut, a-t-on dit, un chevalier sans peur et sans reproche. C’est exact. Aucun recul dans sa vie. L’attaque ne le prenait jamais au dépourvu : il fixait sur son adversaire un regard droit, attentif aux ruses, un grand regard, un regard de tout l’œil ; seule, la bouche trahissait par un mouvement léger