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SOUVENIRS

volonté de trente-quatre nations. J’ai encore dans l’oreille le discours énergique et troublant que Rathenau prononça à la réunion plénière et qui s’achevait sur un vers de Pétrarque : « Io vo gridando O pace ! pace ! » Je vais clamant : Ô paix, paix !

La Haye prendrait donc la succession de Gênes.

Le 19 mai, immédiatement après la dernière réunion plénière, le train spécial réservé à la délégation de l’Empire britannique et qui était sous pression depuis plusieurs jours en gare de Gênes, nous emmène. À chaque arrêt, des foules accouraient pour voir Lloyd George qui souriait, avec une ombre de tristesse peut-être. On l’acclamait.

Le train roulait à une vitesse inquiétante. Le dîner fut servi par des laquais en livrée. Il était excellent. C’est avantageux, observa quelqu’un, de voyager avec un Premier Ministre aussi démocrate.

Le lendemain, avant de toucher Paris, où nous sommes les seuls à descendre, nous prenons congé de Lloyd George. Je lui demande s’il est, somme toute, satisfait de la Conférence. Il fait un geste évasif.

***

À Paris, nous retrouvons nos habitudes. On dirait que rien ne s’est passé en notre absence et que nous reprenons la vie le lendemain de notre départ. Messe, le dimanche, à la Madeleine : long déjeuner dans un restaurant familier de la rue Royale : flânerie le long des rues quasi désertes. C’est le printemps : le soleil est déjà trop chaud. Partout on vend du muguet et du lilas. Les parcs et les jardins sont en fleur.