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Page:Montreuil - Les Rêves morts, 1927 (première édition).djvu/53

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Si d’une âme timide il exprime la crainte
D’un destin rigoureux qui brise un fol espoir,
Il peut discrètement, en exhalat sa plainte,
Et sans tout le trahir, à tous faire savoir
Un chagrin qui parfois éveille le génie.
Le désespoir est beau, quand il scande un sanglot,
S’il peut, sans s’émouvoir, rappeler l’avanie
Qui, goutte empoisonnée, est retournée au flot…
C’est un flot que la vie ! En émergeant, l’épreuve
Laisse au cœur douleureux un souvenir pervers,
Qui sans cesse de fiel ou l’enivre ou l’abreuve,
Et qui, dans l’avenir, prend des aspects divers :
Il peut être la haine et se nommer prudence,
En reniant l’erreur d’un sentiment surfait,
Ou s’appeler regret et n’être qu’impudence,
Pour arrêter la main qui s’apprête au bienfait.
Mais la Bonté toujours peut guider la sagesse,
Et, sans l’humilier, dire au malheur : "Je sais,
Je sais en l’honorant soulager la détresse
Et ne rien imposer des choses que je hais ;
Au cœur désespéré je montre l’espérance
En un destin meilleur ; je parle du devoir
A celui qui l’oublie en sa grande souffrance,
Et si l’on dit adieu, je réponds « au revoir ».
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