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INTRODUCTION.

Ainsi, l’on voit que Thomas Morus s’égare d’une façon étrange dans ses récriminations. En cette occasion et en plusieurs autres, il parle comme un véritable Anglais, toujours armé de ce patriotisme exclusif et partial, qui est le fond du caractère de cette nation, et constitue peut-être un des premiers éléments de sa force.

Néanmoins, il faut le reconnaître, cet homme, dont l’honnêteté était en exemple à son siècle, traversa le monde diplomatique avec dégoût. Sa conscience se trouvait mal à l’aise dans ces négociations, où l’ambition, le mensonge et la perfidie s’agitaient sous une enveloppe fastueuse de religion, de morale et d’honneur. Lui-même l’écrivait à son ami Érasme en ces termes : « Vous ne croirez pas avec quelle répugnance je me trouve mêlé à ces affaires de princes ; il n’est rien au

    1515. Le traite de paix précédent est renouvelé entre Henri VIII et François Ier, en avril. Puis tout à coup l’Angleterre redevient hostile à la France et lui cherche partout des ennemis. Thomas Morus fut un des agents de cette réaction ; il faisait partie de la commission que le roi Henri députa le 7 mai 1515 auprès de l’archiduc Charles (plus tard Charles-Quint), afin de se raccommoder avec ce prince et de calmer ses justes ressentiments.