Page:More - L’Utopie, trad. Stouvenel, 1842.djvu/198

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rien de commun avec la volupté véritable ; car, disent-ils, ce plaisir sensuel ne vient pas de la nature même de l’objet, il est le fruit d’habitudes dépravées qui font trouver doux ce qui est amer. C’est ainsi que les femmes grosses, dont le goût s’est corrompu, trouvent la poix et le suif plus doux que le miel. Cependant le jugement de l’individu, si corrompu soit-il par la maladie ou par l’habitude, ne peut pas plus changer la nature du plaisir qu’il ne lui appartient de transformer la nature des choses.

« Les Utopiens distinguent diverses sortes de vrais plaisirs : les uns se rapportent au corps, les autres à l’âme.

« Les plaisirs de l’âme sont dans le développement de l’intelligence, et les pures délices qui accompagnent la contemplation de la vérité. Nos insulaires y joignent aussi le témoignage d’une vie irréprochable, et l’espérance certaine d’une immortalité bienheureuse.

« Ils divisent en deux espèces les voluptés du corps :

« La première espèce comprend toutes les voluptés qui opèrent sur les sens une impression actuelle, manifeste, et dont la cause est le rétablissement des organes épuisés par la