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LIVRE I.

de paix n’étaient pas moins désastreux que la guerre. La licence des camps avait jeté la corruption dans les cœurs ; le soldat rentrait dans ses foyers avec l’amour du pillage et l’audace de l’assassinat, fruit du meurtre sur les champs de bataille.

« Ces désordres, ce mépris général des lois venaient de ce que le prince, partageant son attention et ses soins entre deux royaumes, ne pouvait bien administrer ni l’un ni l’autre. Les Achoriens voulurent mettre un terme à tant de maux ; ils se réunirent en conseil national, et offrirent poliment au monarque le choix entre les deux États, lui déclarant qu’il ne pouvait plus porter deux couronnes, et qu’il était absurde qu’un grand peuple fût gouverné par une moitié de roi, quand pas un individu ne voudrait d’un muletier qui serait en même temps au service d’un autre maître.

« Ce bon prince prit son parti ; il abandonna son nouveau royaume à l’un de ses amis, qui en fut chassé bientôt après, et il se contenta de son ancienne possession.