Page:Moreau - Le myosotis (Nouvelle édition précédée d'une notice biographique), 1851.djvu/46

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le soldat.

Eh bien ! à ces deux La Fayette,
Ami, rendons le même honneur.
Buvez au chef que je regrette ;
Je bois à votre bienfaiteur.
Ils mériteraient que l’histoire
Les couronnât d’un lustre égal,
Et dans le sentier de la gloire
Chacun d’eux n’a qu’un seul rival.


Moreau, à cette époque, il est facile de le voir, hésitait encore et tâtonnait dans sa voie ; il cherchait…, il essayait sa main sur des cordes rebelles ; mais le moment vient où la confusion va cesser et où l’on pourra sentir à travers tout, à certains cris de l’âme, à certaines notes vibrantes ou émues qu’il y là en germe un beau talent qui ne demande qu’à se produire, une organisation poétique délicate et choisie. Autant et plus qu’un autre, il avait le rayon intérieur et l’élément divin, la puissance harmonieuse qui crée et vivifie, et la source pure qui jaillit du cœur des poëtes pour exalter et enivrer les âmes. Ces débuts, quoique faibles et indécis, ne valent pas moins, en définitive, que la plupart des premiers essais des plus glorieux contemporains.

C’est en 1829 que Moreau, sur la foi de ses rêves autant que sur les promesses trompeuses de quelques protecteurs, vint réclamer à Paris deux choses dont il avait le plus besoin, comme orphelin abandonné et comme poëte, de la gloire et du pain. Paris, toujours indifférent et insoucieux, resta sourd. La gloire a longtemps souri à Moreau : Galatée ironique et cruelle qui fuyait devant lui et l’égarait, et qui n’a laissé tomber le fruit d’or que trop tard ! — du pain, il en manqua le plus souvent, ou il ne l’a tenu guère, hélas ! que des mains de l’amitié. Il eut donc de douces