Page:Morelles - Les diamants de Kruger, 1906.djvu/264

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 262 —

bientôt l’impression produite devint de l’indignation. Le président du tribunal interrompit le condamné, se leva d’un bond, et vociféra :

— Misérable ! taisez-vous, taisez-vous, vous osez plaisanter avec la mort ?

— Pardon, mon colonel, je suis loin de plaisanter ; un mot d’explication vous convaincra.

— Parlez, et vite, car vous méritez d’être souffleté par tout honnête homme qui vient de vous entendre.

— Pardon, mon colonel, fit le prisonnier tout tremblant ; dans la situation terrible où je me trouve, mes pensées ne sont que pour l’Au-delà, et je comprends le sort qui m’attend. Vous avez bien voulu me permettre de parler : je vous en remercie. Mais comme il m’est inutile de me servir ici de ma langue maternelle, le français, et que je ne suis pas assez familier avec l’anglais pour me défendre avantageusement dans cette langue, j’ai cru pouvoir améliorer mon sort, au moment où votre dernier interprète cafre vient d’être tué, en vous prouvant que je parle la langue cafre.

Le colonel parut surpris et intéressé. Pierre s’aperçut de ce changement, il respira. Il pensait à part lui : Je ne sais pas un mot de cafre, ils n’ont rien compris à ce que je viens de dire, ni moi non plus, mais je joue mon va-tout. Si seulement l’exécution est remise à demain, je trouverai bien quelque moyen, d’ici là, pour en sortir.

Cependant, l’un des juges fit remarquer :

— Qui nous prouve que c’est là du cafre ?

Pierre pâlit, il n’avait pas compté avec cette tuile. La sonorité générale du cafre lui était bien connue, mais sa science se bornait là.