Page:Morelles - Les diamants de Kruger, 1906.djvu/49

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 49 —

diable plutôt que d’arrêter le bateau. » D’ailleurs la marche avait déjà subi des retards et on ne se souciait sans doute pas d’en causer de nouveaux. Les fugitifs virent qu’on ne s’occupait plus d’eux, ils respirèrent. Dolbret se leva debout et, d’un ton emphatique : « Brume bénie, je te ferai un poème quand… quand… la saison des bluets sera revenue… »

— Moi aussi, dit P’tit-homme. Hourra ! Hourra !

— Maintenant, fit-il, essayons de monter cette voile. Elle n’est pas grande, mais c’est mieux que rien. Il fait une jolie brise de nord-est, nous allons prendre de belles bordées.

Bientôt la chaloupe fila autant que le lui permettait sa faible voilure, on se mit en frais d’inspecter son contenu plus en détail. Tout à coup Dolbret tressauta et dit d’une voix tremblante :

— Malédiction ! ils reviennent sur nous. Regarde, vois-tu les lumières ?

P’tit-homme se leva de toute sa hauteur — ce qui n’était pas bien haut, surtout en plein océan — et lança à tue-tête :

— Aie ! là, vous autres, venez donc par ici qu’on vous parle.

— Tu es fou ! fit Dolbret.

— C’est vous, docteur ; pardon, je ne veux pas dire que vous n’avez pas votre génie, mais je crois que vous vous trompez.

— Je vois les lumières, elles s’avancent sur nous.

— C’est vrai ce que vous dites là ; c’est une goélette…

— Une goélette ?