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LES DIAMANTS DE KRUGER


I

UN SOU RARE


La lumière des lampes électriques s’irradiait vers la façade des grands magasins et tremblait dans le fourmillement de la porte centrale par où sortaient des centaines d’ouvrières. Pendant cinq minutes il y eut comme un bourdonnement de ruche, puis les têtes blondes et brunes disparurent de tous côtés et, sur l’asphalte gris du trottoir, on ne vit plus, incrusté, que le « Z » de cuivre reluisant que les rayons blanchâtres enveloppaient comme une gloire d’ornement sacré. Mille reflets aux tons riches se jouaient dans les colossales vitrines, feuilles de cristal derrière lesquelles s’échafaudaient avec un art merveilleux les masses amoncelées de lourdes étoffes.

Le bruit tantôt assourdissant de la rue s’évanouissait. À peine entendait-on, de temps en temps, de vagues mélopées chantonnées par des rouliers tout blancs de farine, la pipe noire aux lèvres, presque couchés sur de longs haquets traînés par de lamentables rosses. Puis, débraillé, avec dans la voix des enrouements d’orateur à la mode, un bambin, trop petit pour le métier de camelot, hurlait les titres des feuilles à grand tirage. De l’autre côté de la rue, une vieille femme