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Page:Moreno - Reconnaissance de la région andine, 1897.djvu/71

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bien qu’effaçant les détails, détachent en demi-teintes, insensiblement graduées, les silhouettes des grandes masses (planche XVII).

Le panorama est sauvage, solitaire, et le silence de la nature augmente encore la solennité de ce lieu.

Au fond du grand bassin, quelquefois orageux, sombre, prison de vagues à crêtes écumeuses, et parfois limpide comme un miroir, on voit des îles presque circulaires et d’autres longues comme d’énormes baleines.

Derrière ces îles, au loin, s’élève la sévère et grandiose Cordillère avec ses pics hardis et ses massifs boisés et neigeux, de teintes verdâtre, rougeâtre, noirâtre, bleue et blanche vers les cimes, toute fracturée par de profondes gorges, véritables fjörds norvégiens dont le principal, très étendu, est limité par une montagne toute blanche, mystérieuse et pleine d’attraits pour le voyageur.

Des deux côtés du grand fjörds, s’élèvent des montagnes à pic ; mais celles du côté nord sont moins accidentées. Au premier plan, au fond sud-ouest, les belles montagnes à cime aiguë apparaissent comme un immense coutelas, couvertes de neiges éternelles, et auxquelles j’ai donné le nom de Vicente López, l’immortel auteur de l’hymne national argentin. Le versant opposé au nord est rougeâtre et boisé ; celui de l’est — qui est celui que j’ai signalé — peu incliné, concave, recouvert de neige fraichement tombée sur l’azur des glaces perpétuelles, est une merveilleuse représentation naturelle du pavillon argentin.

Un peu plus loin s’avance un autre massif boisé qui cache de hautes montagnes couronnées de neiges éternelles. Le Tronador n’était pas très visible depuis le campement, mais bien depuis l’embouchure du Limay, avec son sommet presque toujours enveloppé de nuages.

Une grande colline ou montagne peu élevée avec un versant très abrupt recouvert de forêts, dont la base baigne dans le lac, masque une vallée qui s’étend entre elle et les montagnes antérieures, et au-devant de cette vallée vers l’est-sud-est s’élève un autre massif de sommets plus arrondis qui cache le Tronador.

Un pic dont le versant abrupt opposé au sud-est est couvert de neige et de forêts domine une gorge profonde qui va à l’ouest-sud-ouest et est fermée au nord-ouest par d’autres montagnes. Après cette grande gorge, il y a quelques montagnes plus basses qui vont de l’est à l’ouest, limitant de ce côté le grand lac et son ancienne vallée glaciaire, traversant parallèlement aux Andes par des moraines formées de blocs anguleux