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Page:Moressée - Un mariage à Mondorf, 1887.djvu/111

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— Mademoiselle Marcelle, vous savez bien que je n’ai pas d’amis !…

— Comment, pas d’amis ?… Et petit père qui vous a demandé votre amitié, et Raymonde dont vous avez toutes les sympathies !

— Ah ! merci, mademoiselle Marcelle, pour la bonne parole que vous venez de dire là.

— Et moi aussi, je suis votre amie, et si je n’avais pas peur de vous fatiguer je viendrais souvent jouer avec vous. Mais vous réfléchissez toujours et, chaque fois que je vous rencontre, j’ai peur de troubler vos pensées.

Ne soyez pas désespéré, monsieur Darcier : moi aussi j’ai été longtemps malade, bien longtemps et bien malade, et me voici rétablie. Il n’y a fallu que beaucoup de patience et un peu de soumission ; il n’en faudra pas plus pour vous guérir à votre tour.

Alors, faisant au jeune homme un gracieux geste d’adieu, la fillette prit sa course et disparut rapidement au tournant de l’allée. Fernand, resté debout, le regard tourné dans la direction qu’elle avait prise, était comme ébloui de l’intelligence de cette enfant qui lui donnait des conseils dignes de la plus raisonnable des femmes. Puis de son étonnement émergea le souvenir de la phrase dans laquelle la fillette lui avait assuré l’amitié de son père et de sa sœur aînée, Raymonde, dont il avait toutes les sympathies. Cette assurance avait été comme un baume délicieux, versé directement sur la plaie douloureuse de son âme ; il se sentait renaître à l’espérance, une fois encore, et s’abandonnait à son doux rêve.

Était-il possible que la jeune fille n’eût pour lui que de l’amitié, et ne cachait-elle pas sous l’aveu de ce sentiment celui d’un sentiment plus tendre ?