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deux obligés de séjourner encore dans ce même hôtel, ils devaient nécessairement se rencontrer. Ça ne pouvait pas manquer, même plusieurs fois par jour : à table, au jardin, à l’établissement des bains, au parc…

Alors elle estimait utile de se préparer à ces rencontres, afin de se garder un maintien, de tenir un langage en rapport avec la détermination qu’elle avait prise et qu’elle voulait fermement tenir. Simple précaution, très prudente, trop prudente, par malheur, car elle allait diamétralement à l’encontre de sa décision, c’est-à-dire qu’elle la ramenait, encore et toujours, à s’occuper de lui ; lui, ce Fernand qu’elle entendait complètement éloigner de sa pensée…

Oh ! que ce combat intime de son cœur et de sa raison fut long et pénible à soutenir. Elle eut beau se faire, se raidir, s’adresser de gros reproches, le moment vint, facile à prévoir pour tout autre que pour cette âme virginale, où très troublée, le cœur contracté par une épouvante naïve, elle se demanda s’il n’était pas inutile de résister, s’il ne devenait pas impossible de continuer à se donner le change, s’il ne serait pas plus digne, plus conforme à son caractère de s’avouer enfin à elle-même qu’elle aimait Fernand.

Se l’avouer, en convenir franchement en face de soi-même, voilà où elle fut forcée d’en venir enfin. Tout s’éclaircit dès ce moment dans sa conscience. Entre son devoir et son penchant nettement défini désormais, elle put se tracer la ligne de conduite qui lui convenait. Et de nouveau, bravement, avec la certitude de faire ce qu’elle devait faire, elle se répéta :