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battre, se faisant un point d’honneur d’obtenir l’assentiment de son ami au projet qu’il lui avait soumis :

— C’est là, mon pauvre Dubreuil, disait-il, la seule solution possible. Si tu ne t’y résous pas, il te faudra quand même livrer Marcelle. Tu rentreras alors à Paris avec ta fille, et c’est en ta fille, dis-tu, que tu trouveras la consolation dont tu auras besoin ? Hélas ! tu t’aveugles à plaisir. Raymonde ne te pardonnera jamais d’avoir abandonné l’enfant dont elle est depuis dix ans la mère, et de l’avoir brusquement séparée d’elle. En vain voudras-tu lui remontrer que le devoir, la loi t’y contraignaient : elle ne te croira pas, sachant bien, elle, qu’il y avait un moyen de concilier ton devoir avec ton amour, et te faisant, au fond de son cœur, le reproche de n’en pas avoir usé. Car ce moyen, je te l’offre…

Longtemps encore Florian lutta ainsi, gagnant peu à peu du terrain, portant la lumière dans les plis secrets de ce cœur de père qu’une atroce douleur faisait saigner. Il fut vainqueur enfin.

— Tu te rends ?

— Oui, Florian, le bon sens, la vérité sont de ton côté : je t’obéis. Mais sauras-tu jamais ce qu’il m’en a coûté de te faire ce sacrifice ?

— Va, pauvre ami, je sais ce que tu peux souffrir, du moins je le devine. Mais crois-en ma vieille amitié, la récompense ne se fera pas attendre ; c’est là seulement que tu recouvreras la paix.

— Elle est promise sur la terre aux hommes de bonne volonté, dit en terminant M. Dubreuil. Veuille Dieu me prendre en pitié, et me l’accorder en faveur de mes angoisses !…