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Page:Moret - L’emploi des mathématiques en économie politique.djvu/43

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répétée, celle qui est devenue classique, c’est celle qui, dès 1873, à l’occasion de la communication d’un mémoire où L. Walras posait, pour la première fois, les bases de l’économie mathématique moderne, a été formulée en ces termes, par Wolowski, à l’Académie des sciences morales et politiques : « En prétendant faire de l’économie politique une science exacte, M. L. Walras en a méconnu le vrai caractère : l’économie politique est une science morale, qui a pour point de départ et pour but l’homme »[1].

Cette objection a d’ailleurs reçu, il y a bientôt trente ans, de M. F. Bernard, la forme définitive suivante : « Il semble bien difficile que l’on puisse mettre en formules l’intérêt personnel avec tous les facteurs qui s’y rattachent et le combiner par des syllogismes et des sorites mathématiques (substitutions ou réductions, équations et conjointes) avec les forces naturelles, le milieu si complexe en conflit avec les intérêts de l’homme »[2]. Et depuis lors tous les contempteurs de l’économie mathématique n’ont pas cessé de reprendre, pour lui donner de nouveaux développements, le thème de l’incompatibilité des mathématiques et de l’économie politique par suite du fait que cette dernière est une science morale.

Les uns, faisant remarquer l’influence des sentiments et des passions sur toutes les décisions humaines, s’en sont allés répétant que « la liberté humaine ne se laisse pas mettre en équations », ou que ce les mathématiques font abstraction des frottements qui sont tout

  1. Compte rendu des séances et travaux de l’Académie des sciences morales et politiques, numéro de janvier 1874, p. 120.
  2. De la méthode en économie politique dans le Journal des Économistes, numéro d’avril 1885, p. 14.